LE RECOURS DES TIERS PAYEURS : UNE ANALYSE À LA LUMIÈRE DU LIVRE 2 DU CODE CIMA
www.jurantiel.com, par OMBOLO MENOGA Pierre Emmanuel
INTRODUCTION
Il existe plusieurs références au recours des tiers payeurs dans le livre 2 du Code CIMA. La première découle de l’article 240 dudit Code qui en fait l’un des renseignements que la victime blessée est tenue de fournir à l’assureur. La deuxième est donnée par l’article 241 qui procède de façon même que l’article précédent, mais il vise cette fois les ayants droit de la victime décédée. Les plus explicites, c’est-à-dire celles qui ont un impact clairement affirmé par le législateur supranational sont les articles 243 et 246, eux-mêmes en quelque sorte introductifs aux articles 254 et 255 du Code CIMA. Dans tous les cas, il est indéniable que le recours des tiers payeurs ne doit pas être négligé par l’assureur de responsabilité civile automobile qui, s’il paie mal pourra être amené à payer deux fois. C’est dans cette optique que se situe cet appendice dont le filigrane a trait à l’idée qu’il faut savoir tenir compte du recours des tiers payeurs dans le processus d’indemnisation des victimes de dommages corporels d’accident de la circulation.
1. Quelles sont les prestations des tiers payeurs ouvrant droit à un recours ?
Les prestations qui ouvrent doit à recours aux tiers payeurs sont énumérées par l’article 245 du Code CIMA. Ce sont nécessairement des prestations à caractère indemnitaire (à l’exclusion des préjudices à caractère personnel).
Elles concernent :
En cas de décès :
Il s’agit de deux cas limitatifs :
- les capitaux décès versés par les organismes sociaux quels qu’ils soient ;
- les rentes et pensions de reversions servies par ces organismes ou par les débiteurs divers au profit du ou des conjoints survivants ainsi que des enfants de la victime.
Les deux cas ci-dessus sont limitatifs. Ils ne comprennent pas les caisses de retraite qui sont souvent gérés par l’Etat. En pareille hypothèse, les prestations qui sont versées à leurs bénéficiaires ne rentrent pas dans le périmètre du recours des tiers payeurs ; les caisses de retraite n’ayant pas cette qualité.
En cas de blessure :
Il s’agit des prestations versées par les organismes sociaux au titre :
- des frais de traitement médical et de rééducation ;
- des prestations en espèces pour incapacité temporaire ou permanente ;
- les salaires et les accessoires du salaire maintenus par l’employeur ;
- les prestations versées par les groupements mutualistes ;
- les prestations servies par l’assureur qui a indemnisé l’assuré dans le cadre d’un contrat d’avance sur recours.
On observe que la liste en cas de blessure est plus longue que celle en cas de décès. Elle reste tout de même limitative.
2. Quelles sont les modalités de production des créances des tiers payeurs ?
Les créances des tiers payeurs peuvent être produites soit par le canal des bénéficiaires soit par les tiers payeurs eux-mêmes, à la demande de l’assureur.
Dans le premier cas, cette situation peut se présenter lorsqu’en application des articles 240 et 241 du Code CIMA, l’assureur a demandé aux bénéficiaires de lui fournir la liste des tiers payeurs appelés à lui fournir des prestations et qu’il a obtenu des bénéficiaires, outre ladite liste, des justificatifs de paiements effectués par les tiers payeurs, et en rapport avec le sinistre concerné.
Dans le deuxième cas, l’assureur peut recevoir du tiers payeur la production de ses créances en application de l’article 255 du Code CIMA. Dans cette hypothèse, les étapes de leurs échanges sont les suivantes :
- Une demande adressée par l’assureur au tiers payeur en vue de la production de ses créances. Cette demande doit préciser les noms, prénoms, adresse de la victime, son activité professionnelle et l’adresse de son ou ses employeurs ;
- La production des créances par le tiers payeur qui doit indiquer les dispositions législatives, réglementaires ou les stipulations conventionnelles en vertu desquelles il est tenu de verser des sommes à la victime ;
- Le tiers payeur est tenu d’exercer son recours poste par poste, sur les seuls préjudices à caractère indemnitaire qu’il a effectivement pris en charge. Un décompte est donc nécessaire et assorti de justificatifs.
Le tiers payeur dispose d’un délai de six mois à compter de la demande émanant de l’assureur pour produire ses créances. Passé ce délai, il est déchu de ses droits à l’égard de l’assureur et de l’auteur du dommage.
3. Quel est le régime juridique du recours des tiers payeurs ?
Sous le vocable de régime juridique contenu dans cette question, nous entendons surtout les influences du recours subrogatoire. Ainsi, ce recours subrogatoire spécifique produit plusieurs effets sur le processus d’indemnisation.
La principale influence est celle de l’opposabilité à la victime et à l’assureur. Ce qui veut dire que l’assureur peut opposer les incidences du recours des tiers payeurs à la victime. De la même façon, l’assureur doit prendre en compte l’existence éventuelle ou avérée des tiers payeurs dans le traitement du dossier, dans l’offre d’indemnisation et dans le paiement effectif du dossier.
C’est dans ce sens que l’article 246 du Code CIMA dispose que :
« L’offre d’indemnité doit indiquer, outre les mentions exigées par l’article 231, les créances de chaque tiers payeur et les sommes qui reviennent au bénéficiaire. Elle est accompagnée de la copie des décomptes produits par les tiers payeurs.
Si la victime ou ses ayants droit n’a pas communiqué à l’assureur la liste des tiers payeurs, le paiement effectué est libératoire, les tiers payeurs devront adresser leurs recours à la victime ou ses ayants droit bénéficiaires de l’indemnité. »
Au regard de cette disposition, il est possible d’affirmer qu’en réalité, la demande de production de créance que l’assureur adresse au tiers payeur provient soit d’un indice clair de l’existence de ce dernier soit d’une information de la victime ou ses ayants droit.
Par OMBOLO MENOGA Pierre Emmanuel
N.B : Cette contribution intellectuelle a été précédemment publiée dans le blog de l’Association Lumière du Droit : www.lumiairedudroit.centerblog.net